Communiqué de soutien à la grève de la faim au CRA de Lyon St-Exupéry

Suite à la découverte d‘au moins 4 cas positifs au Covid19 ( dont 1 à l’isolement ) la semaine dernière, des prisonniè.res ont entamé une grève de la faim mercredi dernier pour exiger leur libération immédiate. 
La grève de la faim a pris de l’ampleur, elle est suivie par la quasi totalité des prisonni.ères. 
Nous écrivons ce communiqué pour répondre à leur demande de visibiliser leur lutte et de leurs revendications. 
Si la grève de la faim actuellement menée permet de médiatiser la situation inhumaine à l’intérieur des CRA, il ne faut pas oublier que les résistances face à la violence du système carcéral auxquel ils sont confrontés y sont quotidiennes et variées, comme l’attestent les nobmreux témoignages du site.
En pleine cinquième vague, la distanciation sociale est par définition impossible dans les CRA,, aucune mesure sanitaire sérieuse n’est prise pour protéger ou soigner les personnes, et les violences policières et les insultes y sont quotidiennes.
 
De plus, de nombreuses frontières extérieures à l’Europe étant toujours fermées, les expulsions sont souvent impossibles. Bien que des vols soient suspendus, les refus de test restent pourtant considérécomme une obstruction à l’éloignement, et donnent de plus en plus lieu à des peines de prison ferme. Enfermer au centre de rétention administrative en l’absence de perspectives d’éloignement est donc le comble de la privation de liberté abusive.
 
Depuis le premier confinement en 2020, la situation n’a guère changé, voire a empiré au regard du contexte éléctoral délétère du moment : la volonté politique de criminaliser et d’expulser les sans-papiers prime encore sur l’accès aux soins et aux droits.
En tant que collectifs et associations, vous pouvez soutenir la lutte des prisonni.ères en relayant leur témoignage, en appelant les cabines, en diffusant les paroles de l’intérieur et les résistances en cours. 
Manifestons notre solidarités par tous les moyens. 
Ces prochains jours, nous allons continuer à relayer le mouvement de lutte ainsi que plusieurs témoignages.
Plusieurs actions en soutien à la grève de la faim sont déjà prévues, si vous voulez y participer, restez informé.es. 
A BAS LES FRONTIERES,
A BAS LES CRA

Il est impossible de soigner dans les lieux d’enfermement

Dans les CRA les violences médicales sont quotidiennes. Les unités médicales participent au système qui trie, enferme et expulse les personnes sans-papiérisées, et sont directement complices de la PAF. Le soin est par définition incompatible avec l’enfermement.

 

 

Le texte suivant a été envoyé à une liste de structures et d’associations liées au milieu médical et médico-social afin de les alerter sur les pratiques médicales abusives dans le CRA de Lyon Saint Exupéry, régulièrement dénoncées par les prisonnièr.es dans leurs témoignages.

 

« Bonjour,Nous sommes un collectif qui lutte pour la fermeture des CRA, les prisons pour sans-papiers. Nous sommes en contact avec les prisonnièr.es et publions régulièrement leurs témoignages sur notre site.
Nous voulions vous alerter sur la situation à l’intérieur du CRA de Lyon Saint-Exupéry.Depuis que nous sommes en contact avec des prisonnièr.es, tous les témoignages qui abordent la question de l’accès aux soins et des conditions sanitaires au sein de l’UMCRA font état des violences médicales systématiques exercées à leur encontre sous différentes formes : distribution abusive de traitements, notamment psychotropes (anxiolititiques, neuroleptiques…) et substitutifs,refus de la part du médecin d’appeler le SAMU ou les pompiers, refus d’accès à des soins urgents, non prise en considération de symptômes décrits par la personne, posologie arbitraire, rupture de traitement nécessaire..

De toute évidence, le dispostif des UMCRA ne garantit pas le droit fondamental à la protection de la santé, consacré par l’alinéa 11 du préambule de la Constitution de 1946, qui implique, outre la sécurité sanitaire, un égal accès aux soins ainsi que leur continuité. De trop nombreux témoignages mettent en cause la déontologie médicale et indiquent le non-respect de la dignité des personnes enfermées malades. Au lieu de les accompagner et de leur apporter les soins nécessaires, par définition incompatibles avec l’enfermement, les unités médicales au sein des CRA minimisent les souffrances psychiques et physiques exprimées, et participent ainsi à renforcer la vulnérabilité des personnes concernées. Déjà soumises à la violence administrative et policière inhérente à l’enfermement, les prisonnièr.es sont donc également confronté.es à une violence médicale plus difficile à dénoncer.

Les acteur.ices  du médico-social ne doivent pas cautionner la logique répressive et raciste qui existe dans les CRA, et qui est elle-même la cause de souffrances physiques et psychiques pour les prisonnièr.es. Au minimum, il est en votre pouvoir de prendre position publiquement pour dénoncer cette situation.

Vous pouvez lire sur ce blog des témoignages des prisonnièr.es du CRA de Lyon, qui évoquent régulièrement les cas de maltraitances médicales. Le rapport des associations sur les CRA de 2019 évoque également « un droit à la santé de plus en plus sacrifié ». D’autres témoignages sont à lire sur les sites de A bas les CRA et Toulouse Anti Cra.

Lyon anticra, collectif de soutien aux prisonnièr.es du CRA de Lyon et de lutte pour la fermeture des centres de rétention »

MANIFESTATION DES PRISONNIERS DU CRA DE LYON ST-EXUPÉRY LE 8 FÉVRIER // Violences policières, nourriture infecte, humiliations, isolement prolongé, non transmission systématique par Forum des documents juridiques, prisonniers drogués aux médicaments par les médecins… Témoignages de prisonniers du CRA de Lyon St-Exupéry, le 09/02/2021

Témoignages de 5 prisonniers retenus au CRA de Lyon Saint-Exupéry, le 09 février 2021. La veille au soir, les prisonniers de plusieurs blocs s’étaient retrouvés et avaient manifesté contre les violences de la police, ainsi que pour dénoncer la nourriture du centre, celle infecte qu’on leur sert, ou les distributeurs toujours vides.

TÉMOIGNAGE 1

 

– Bonsoir ! ça va?

– Ça va et toi ?

– Ça va hamdoullah.

– Est-ce que y’a des trucs que t’as envie de raconter sur comment ça se passe à l’intérieur, ce qui s’est passé hier soir…?

– Je te dis la vérité, moi j’ai quitté la France ça fait 4 ans. J’ai ma femme et ma fille en Espagne. J’étais passager pour aller en Suisse, ils m’ont attrapé dans le train, ils m’ont ramené ici. J’ai 48 jours. L’Algérie a fermé ses frontières, et je suis là je sais pas pourquoi moi ! Pose les questions, moi je réponds, pose, pas de souci.

– Est-ce que t’as envie de parler de ce qui s’est passé hier soir ?

– Ouais. Hier c’est moi qui ai fait le bordel.

– Qu’est-ce qui s’est passé en fait?

– Parce que y’a pas de respect. Moi j’ai mangé, le policier il a mis ses pieds devant moi. Moi j’ai mangé sur la table, alors je me suis énervé. J’ai ramené tout le monde et on a fait la guerre.

– Vous avez fait quoi?

– On a fait la manifestation. Mais y’a pas de mal, y’a rien de mal. On a ramené toutes nos affaires en promenade et on est restés là bas. Ils ont amené les casques bleus, les CRS et tout.

– Vous vous avez tous mis vos matelas dans les couloirs c’est ça ?

– C’est tout, c’est tout. Il y a des caméras.

– Et c’était quoi vos revendications?

– Si l’Algérie ouvre ses frontières, envoie moi en Algérie. Si l’Algérie ferme ses frontières, lâche moi, moi j’ai ma vie en Espagne, j’ai ma femme, j’ai ma fille. J’ai rien à voir ici moi, j’étais passager. t’as compris? J’ai 48 jours pour rien, pour rien, j’ai rien fait de mal. Mais pourquoi ? Ils ont envoyé en Algérie quatre fois pour mon nom, l’Algérie répond pas. pourquoi tu me gardes ici ? Il y a le covid, il y a des personnes malades, de l’autre côté, côté vert, il y a 4 côtés dans ce centre de merde, excuse moi. Normalement les frontières de la France sont fermées, normalement relâchez les gens! Il y a des gens avec ses papiers, on les lâche pas aussi ! ça c’est pas la loi ! Donnez-moi quitter le territoire, je quitte le territoire. Si ils m’attrapent, j’assume 10 ans de prison, je m’en bats les couilles. Moi j’ai pas envie de rester en France. Soit lâchez moi, soit envoyez moi au bled. tout simplement. Si je m’énerve encore, je suicide, sur la vie de ma mère! Je suicide! normalement, je suicide. Parce que j’ai rien fait, j’ai rien fait, je suis là pour 48 jours. pour rien, pour rien. J’ai rien fait.

– Et hier soir il s’est passé quoi après votre manifestation?

– Hier tout le monde s’est énervé, on a pris les matelas, on est partis à la promenade, parce que tous les jours la bouffe périmée. ça pue. la bouffe ça pue. je peux pas manger ça moi. Ils manquent de respect, ils sont racistes… Viens et regarde ! ramène beaucoup de gens devant le centre de merde, pour voir.

Il y’a des gens ils ont refusé le test, ils sont partis en prison, après la prison ils sont ramenés ici. C’est quoi ça? ça c’est pas la loi ça.

– Et les flics ils sont racistes?

– Ils sont racistes oui. pas tous. mais la plupart sont racistes.

– Ils vous font quoi?

– On dirait qu’on est des chiens. On n’est pas des chiens! On n’a pas de papiers c’est tout. On a de l’argent, on a de la famille, on a tout nous. Dehors de cette prison de merde, on vit la belle vie. On vit une meilleure vie que ces policiers de merde. J’ai un travail, j’ai ma fille, j’ai ma femme, j’ai ma vie. Ma place c’est pas d’ici. Si les frontières d’Algérie sont ouvertes envoie moi, normal! j’ai mon père et ma mère. Si elles sont fermées, laisse moi partir en Espagne, j’ai ma femme et ma fille! t’as compris? moi j’ai rien fait de mal ! T’as pas d’autres questions?

– T’as envie de raconter un peu comment ça se passe à l’intérieur?

– Ça se passe grave grave mal. Tous les jours on dort, le ménage pas bien, ils nous laissent dans le froid dehors, on reste 3 heures dans le froid. Moi j’ai fait la prison ici en France. Wallah je te te dis la vérité, la prison c’est mieux que ce centre de merde. wallah! Moi je préfère 1 an en prison que 1 mois ici.

– Ça se passe comment au niveau de l’association Forum(1), avec les médecins…?

– Forum travaille avec la justice! moi je déteste Forum. Forum travaille avec la justice. Le docteur travaille contre nous, tous contre nous.

– Il fait quoi le docteur?

– Le docteur je lui dis donne moi mon traitement, il me manque de respect, il me dit non c’est pas… on n’est pas au marché noir. Moi j’ai des médicaments, je suis obligé de les boire.

Forum ils envoient les gens au bled, on dirait ils aident les gens, mais le contraire. moi je connais bien, je connais bien, ouais ouais, ça fait longtemps. Forum c’est pire que le juge. Forum travaille avec la justice. Il n’a jamais aidé moi. Il y a un gens, il a envoyé ses preuves, t’as compris ? Forum l’appelle désolé, il a fait la feuille toute noire devant le juge. Le juge il voit la feuille il rigole. c’est quoi ça? feuille noire ! c’est pas comme ça!

– J’ai pas entendu.

– T’as pas compris? il y a une personne elle a des papiers à lui, originaux. Il a fait une photocopie. La photocopie, il vient, 100% tu vois sa photo, et Forum a rendu sa photocopie toute noire! Le juge regarde rien! Et il l’a mis au centre encore 30 jours. Pourquoi ça? Il y’a un gens, le juge il demande ramène moi hébergement je te relâche. Il ramène l’hébergement, encore 30 jours. Hè ! ici comment ça se passe? bonjour, 28 jours, bonjour, 28 jours. tous les jours! c’est pas que moi! [passage inaudible] Il y a des gens malades du covid à côté de nous. Dans la chambre de 4 lits on dort 8, 8 personnes! y’a des chambres y’a pas de porte, wallah, y’a pas de porte.

Je te passe le suivant. Moi j’ai la haine, j’ai la haine, wallah j’ai la haine. J’ai envie de suicider, j’ai la haine. Je te passe le suivant.

– On est de tout cœur avec toi. courage.

– Bonne soirée merci beaucoup. Merci pour nous aider, tout le monde.

 

TÉMOIGNAGE 2

 

– Oui bonsoir.

– Du coup est-ce que toi tu étais là hier soir ?

– Ouais j’étais là.

– Est-ce que tu veux raconter un petit peu comment ça s’est passé ?

– Bah c’est moi je me suis embrouillé avec le flic. C’est moi, c’est à cause de moi. Parce que moi j’étais en train de parler avec mon ami et lui il est venu et il a posé ses pieds sur la table et il m’a dit, il m’a dit : tu parles mal de moi, jsais pas quoi. Il commence a me chercher, je sais pas quoi. Ils sont venu à 10 sur moi et ils commencent à me chercher et tout. Moi je dis vas-y, j’ai pas parlé avec vous, jparle avec mon ami. Et lui il commence à me provoquer et… On a sorti, on a sorti les matelas, on a commencé à crier et tout.

– Vous criez quoi ?

– On crie ! Ya pas de la loi ! Les gens nous prennent pour des chiens ! Ils nous considèrent comme des chiens ici ! Bah il s’en battent les couilles ! Ils s’en foutent de de nos gueules ou jsais pas moi.

Et moi par exemple moi j’ai, moi, c’est le même cas comme X, comme monsieur X. Moi j’ai ma carte de séjour italienne illimitée, j’ai ma carte d’identité, j’ai ma carte vitale, j’ai l’hébergement ici en France. Je suis arrivé en France à l’âge de 14 ans. Normalement, normalement ils ont pas le droit de m’envoyer en Tunisie ! J’ai toutes les preuves. Je suis arrivé à l’âge de 14 ans en France, je suis allé dans un foyer, et en plus de ça, j’ai ma carte de séjour et toute famille en Italie, j’ai ramené toutes les preuves et je leur disais c’est bon je ramène mon passeport et je ramène un billet et je prends, je prends l’avion et je rentre en tunisie ya pas de soucis.
Bah ils m’ont dit, c’est pas toi qui choisit.
Et j’ai appelé mon père et il est parti avec l’avocat en préfecture en Italie. Il a dit « comment ça se fait mon fils il est là-bas, il est bloqué et tout ? », et ils ont dit comme quoi l’Italie elle t’a pas acceptée ou je sais pas quoi. Et mon père il est partit là-bas en préfecture et il a dit « Comment ça se fait mon fils il a sa carte de séjour et vous l’acceptez pas ? »
Ils ont dit « C’est pas vrai on n’a rien reçu ! C’est pas vrai. »
Ils m’ont envoyé, ils m’ont envoyé une feuille de la préfecture comme quoi moi j’existe et tout. Et là quand j’ai passé devant la juge elle m’a dit 28 jours encore. Et en plus de ça ! Moi j’ai ma carte de séjour et je suis arrivé à l’âge de 5 ans en Italie et j’ai toute ma famille et ils m’ont donné une interdiction Schengen ! Ils ont pas le droit ! Normalement moi j’ai ma carte de séjour illimitée, j’ai toute ma famille en Italie ! Et ils ont vu, ils ont vu bien que j’avais ma carte de séjour ! J’avais tout mes papiers et tout, ils m’ont donné une interdiction Schengen ! Il ont pas le droit de le faire !

– Et l’avocat il t’a dit quoi par rapport à ça ?

– Bah l’avocat moi, moi j’ai appelé un avocat, je voulais prendre un avocat payant, avocat privé, j’ai appelé un avocat, et il m’a dit, j’ai parlé avec lui, et le forum ils ont envoyé mon dossier à l’avocat et quand je suis arrivé euh… Quand je suis arrivé devant là-bas, je suis arrivé, avant de passer devant la juge. J’ai parlé avec lui et c’était c’était c’était même pas un avocat ! Il avait même pas un ordi ! Il était avec une feuille, une seule feuille. Jlui dit « Tiens ! Tiens ! Jte donne » parce que moi j’ai toutes mes preuves sur moi, jleur fait pas confiance. Parce que ma première jugement j’avais tous mes papiers ici, ma carte de séjour, ma carte d’identité, ma carte vitale. J’ai tout ! Du coup, j’ai tout ce qu’il faut ! L’hébergement, tout tout tout ! Et le Forum ici, ils m’ont dit, on va envoyer tout ton dossier, on l’envoie au juge et quand je suis arrivé devant la juge, la juge elle m’a sorti juste une photocopie de ma carte de séjour, elle était noire ! Elle m’a dit, elle m’a dit « C’est ça ? C’est ça tes papiers ? »

C’est quoi ça ? Bah ils nous fait ils nous fait la misère ici. Ils nous considèrent comme des chiens.

Ah ! Ah ! Ah ! La bouffe elle est périmée ! On dort pas bien ! Euh c’est sale ! C’est sale ! C’est sale !

Et… Ils nous provoquent ! Ils nous cherchent !

Ya pas de télé, ya ya ya, ici ya [passage inaudible] ya des chambres ya 3 télés.

– Et avec la police ça se passe comment ?

– Avec la police ? Bah la police ils s’en battent les couilles la police !!
Moi je demande, ils m’ont dit l’Italie elle t’a refusée bah je leur disais, c’est bon ! C’est bon j’accepte ! Jvais rentrer en Tunisie c’est bon, l’Italie elle m’a pas acceptée et je sais bien que l’Italie ils les ont pas envoyé, c’est des menteurs ! Et moi je leur disais : c’est bon je veux rentrer dans mon pays et je ramène mon passeport, j’ai ma carte de séjour, j’ai mes papiers en règle, je ramène un billet et je rentre ! Ils m’ont dit c’est pas toi qui décide..

– Et avec le médecin tu as eu des ennuis avec lui ?

– Le médecin !? Le médecin faut le voir le médecin !! Oh j’allais, j’allais, j’allais prendre un RDV avec le médecin il m’a dit « Dans un mois ». Imaginez vous ! On dirait moi je vais rester ici 10 ans.

C’est trop c’est trop ! Ya pas de la loi !

Ils font comme ils veulent ! Ils s’en battent les couilles ! Je demande de voir les civils, ils me disent « non » je demande de voir le consulat tunisien, j’ai pas le droit. J’ai le droit de voir ! je suis un tunisien, je suis de nationalité tunisienne, j’ai le droit de voir le consulat tunisien. C’est vrai ou pas ? Bah eux ils me disent « non ». Ça fait 2 semaines je demande de voir le consulat à chaque fois ils me disent : « demain demain demain » et il y a rien.

Et moi personnellement j’en peux plus. Moi, moi je veux prendre un avocat je vais payer 2000 euros, j’ai mes papiers et je veux prendre un avocat, je vais payer 2000 euros et j’ai mes papiers. Il y a des gens qui ont pas de papiers, ils sortent ils sont libérés et moi j’ai mes papiers, j’ai tous mes trucs, et j’ai grandi en Italie, j’ai toute ma famille en Italie, et je vais prendre un avocat, il va savoir si ils me libèrent ou pas, imaginez-vous.

C’est trop, mais c’est trop, c’est trop. Moi, moi je viens de la prison, moi j’étais en prison, je pesais 80 kilos, là, ça.. je fais 50 kilos.
Il y a rien à manger ! Je vais manger quoi moi ? À part le pain je mange le pain, je bois de l’eau. Pain fromage eau, pain fromage eau, c’est ça. C’est trop c’est trop. C’est pas ça la France, c’est pas ça. Liberté, égalité euh jsais pas quoi.

– Et ça s’est fini comment après hier soir du coup ? Après il y a les CRS qui sont venus et puis euh ?

– Ouais ouais, il y a les CRS qui sont venus, bottés, cagoulés, on dirait, on dirait je sais pas quoi moi. On dirait euh, on est armés nous. Ils sont venus boucliers, avec les gazeuzes, euh jsais pas quoi, ils sont venus à 30 personnes, et nous wallah on est 15 personnes oh, même pas. Ils sont venus, ils ont dit calmez-vous sinon ça va mal se passer ou je sais pas quoi.

– C’était que dans votre bloc que ça se passait ?

– Non il y en a ils sont venus ; mais c’est nous qu’on a commencé, les autres ils ont fait comme nous. Ici il y a un côté arrivants, côté rouge. Il faut rester 8 jours après, il faut faire le test pour passer dans dans l’autre bloc. Il y 3 blocs il y a le jaune, orange et bleu. Les gens qui étaient dans le rouge normalement, moi je sais pas, il viennent de dehors voilà. Des fois ils viennent ils ont le corona et tout. Ils ont cassé la porte, ils sont venus dans notre promenade, ils étaient avec nous.

Et je sais pas moi, je commence à péter les plombs moi.

– Est-ce que il y a des choses que tu voudrais rajouter ?

– Moi moi je veux rajouter ! Moi je fais quoi là ? Je veux rajouter, ce centre là, il est fait pour les gens sans papiers. Normalement ce centre il est fait pour les gens sans papiers. Par exemple j’ai un ami à moi il a une nationalité italienne, et ils l’ont pris en Tunisie, ils l’ont expulsé en Tunisie, il a le passeport rouge, il est né en Italie. Imaginez-vous. Ben, c’est pas logique ça c’est trop. Et en plus de ça je suis arrivé à l’age de 14 ans en France. j’étais dans un collège, j’étais au foyer. Déjà, déjà normalement moi j’ai le droit d’avoir la nationalité française. Mais moi j’ai pas fait les démarches, c’est pour ça. Déjà normalement quand j’arrive, normalement quand un personne il arrive à l’âge de 14 ans, ils ont pas le droit de l’envoyer, de l’expulser. Et eux ils veulent m’envoyer en Tunisie et moi, moi, c’est mon pays je m’en bas les couilles, je rentre en Tunisie mais eux ils veulent pas, ils me faire la misère. Ils veulent me laisser jusqu’à la fin, pour que moi je pète les plombs ou pour que ils peuvent m’envoyer en prison, jsais pas moi jsais pas. Moi je leur disais, je prend mon billet, vous voulez pas me renvoyer en Italie, je sais bien que l’Italie elle m’a pas refusé. Je leur disais, l’Italie elle m’a refusé ben moi je ramène mon passeport, j’ai ma carte de séjour ma carte d’identité, je ramène mon passeport et les billets. Et en plus de ça, le centre il est à côté de l’aéroport, et je prend l’avion et je rentre en Tunisie. C’est simple. Ils m’ont dit c’est pas toi qui choisis.

– Merci beaucoup d’avoir parlé.

– Il y a pas de soucis.

-Courage à toi, on se tient au courant

– merci à vous je vous passe le suivant, bonne soirée.

 

TÉMOIGNAGE 3

 

– Salut

– Salut ça va ?

– Ça va. Bon juste pour ajouter quelque chose voilà ? c’est j’en ai marre. Tout ce qu’ils ont dit mes amis, comme ils l’ont dit les racistes, les policiers avec les PAF(2) ils sont pas biens avec nous. Voilà. C’est quelqu’un de nerveux, moi j’étais tout seul parce que il y a des côtés(3) ici voilà. On passe une semaine après les tests, j’ai refusé les tests parce que il avait quelqu’un méchant le matin il parle mal. Moi j’aime pas, on respecte d’abord. Et après il m’a dit « viens on fait les tests » et paf agressif.

– C’est un policier qui t’a dit de venir faire les tests ?

– Moi j’ai refusé, et après ils m’ont laissé une semaine tout seul. Normalement c’est pas garde-à-vue, parce que garde-à-vue il y a limite 24h, moi je suis resté une semaine complète tout seul, comme les fous, même j’ai demandé un briquet, et ils parlent comme le robot, ça m’énerve. [passage inaudible] Ils sont tous comme ça. Manque de respect. Ils respectent pas leur parole, ils disent j’arrive dans 1 minute, ils arrivent après une heure. Et ils parlent bizarre. Alors, c’est pour ça ici, si y’a du respect et tout ça va, mais manque de respect, dégueulasse, on reste 2 heures, 3 heures dans le froid chaque jour. Aujourd’hui par exemple on a été dehors de 11 heures jusqu’à 14 heures. Ils sont fous. Si on demande quelque chose, toujours on est sûrs c’est pas accepté. Ouais.

– Et quand ils t’ont laissé une semaine tout seul, t’étais dans une pièce ? t’avais le droit de sortir ?

– Non ! Heureusement il y a une femme, le 4ème ou 5ème jour peut-être, elle a dit « pourquoi vous le laissez tout seul ? Sans contact ». Et après ils m’ont envoyé dans la cour sur 4, on dirait 5 mètres carrés quelque chose comme ça . Juste pour [passage inaudible] mais au début je restais 4, 5 jours dans une chambre, il y a un petit couloir comme ça c’est tout.
Je demandé un briqué, ils ont dit c’est sa place, ils ont laissé sa place comme ça, sans briquet. Manque de respect.

– tu pouvais pas sortir pendant 4 jours ?

Non ! Je sors pas, 4 ou 5 jours j’ai oublié, voilà soit 4 ou 5 jours, après les 2 ou 3 dernièrs j’ai sorti juste pour la cour c’est pas loin et toujours 3 ou 4 portes fermées voilà.

– Et pour la bouffe ils t’amenaient à manger ?

– Ben j’ai refusé au début, après j’ai mangé mais c’est la merde comme ils ont dit mes amis. Mais on mange quelque chose juste pour on reste vivre voilà c’est tout.

-Et pendant ces quelques jours t’as pu voir le médecin ou parler aux gens de Forum ?

– Le problème même j’ai demandé le médecin, je tape les portes j’étais comme des fous, et il s’en fout, il dit « ah il faut la patience » ; mais il faut la patience, en plus il faut respecter parole aussi, on a la patience, mais il y a une limite et vous il faut nous respecter comme êtres humains comme vous. En plus moi j’ai mes papiers, mais même pour tout le monde, on est un être humain comme vous ; alors pour les flics, vous êtes policiers, vous avez salaire, nous aussi dehors on a du salaire on a des familles on a de la vie ! Il faut respecter ! Mais moi je pense pas la France comme ça, je pense y’a respect, et tout voilà mais laisse tomber, si tout le monde vive comme ici c’est fini.

-Tu étais là hier soir ?

– Oui, ah ouais on est tous, on a sorti les matelas, on a fait manifestation pour voir solutions avec nous, parce que le problème, c’est si il y a la loi, nous on respecte la loi c’est obligatoire c’est obligé, mais le problème, la loi ils ont caché la loi toujours, quelqu’un encore il a dit : mon ami il la carte séjour, ils ont envoyé le Forum ici sa carte séjour noire ! mais pourquoi ils font ça ? Nous on est en 2021 : technologie, l’internet, les mails et tout, il faut pas faire d’erreur comme ça ! Il est ici avec nous à cause de l’erreur. Et moi le Forum il a pas envoyé mon attestation d’hébergement, à cause d’eux je suis là. Mais normalement je suis libéré parce que j’ai carte séjour et domiciliation. Le juge, malheureusement j’ai pas de smartphone moi ici, je t’envoie mes papiers, j’ai mes papiers toujours avec moi, c’est marqué monsieur X sans domicile fixe ! c’est quoi ça …

-Comment ça c’est fini hier soir ?

-Ils ont faif renforts, ils ont venu nombreux ici et… voilà … Ils ont calmés nous, ils ont fermé la porte ! d’habitude c’est 23h hier ils ont fermé la porte 21h.
Ils ont tout déjà, les les gaz, les battes, toutes les protections là.

-Ils vous ont gazé ?

– Non non

– Tu veux rajouter quelque chose ?

-Non non c’est bon

– Est-ce que tu sais si beaucoup de gens ont le covid dans le centre ?

-J’ai entendu de l’autre côté il ya deux trois personnes ils ont le covid. Mais les règles sanitaires et tout : pas du tout ici, c’est pas comme l’extérieur, nous on est 4-5 par chambre, et les distances jamais, les masques jamais sauf dans le refectoire…

Je te passe une autre personne, si tu es interessée pour écouter.

– Merci bonne soirée.

 

TÉMOIGNAGE 4

 

-Bonsoir, ça va vous allez bien ?

– Ca va et toi ?

– Wallah ça va hamdoullah, on essaie d’être ça va mais ils nous laissent pas ça va, ils nous laissent pas tranquille. On commence par quoi ? Vous voulez quoi ? Les chambres ? Même le ménage. Déjà ils font pas le ménage correctement. À manger, j’vous jure c’est de la merde, j’sais pas ils ramènent d’où les poissons, même les steaks pas hallal ya rien qu’est hallal ici. Les arabes y’a 90 % des arabes. Déjà ça de un. Les policiers ils sont mal polis, ils sont mal polis les policiers, ils parlent mal tous les jours .. [passage inaudible] Y a des policiers ils sont gentils mais le reste y a des policiers ils sont racistes comme jamais de la vie.

Je vous jure sur la tête de ma mère j’ai rien.. j’ai jamais fumé de ma vie, j’ai jamais bu de ma vie, là je suis ici, là je fume, j’prends des médicaments, j’fais tout à cause d’eux.

-Tu prends quoi comme médicaments ?

– Lyrica, Subutex, tout ce qui est médicament pour calmer la tête j’le prends ! Tout ce qu’elle me donne si c’est clairement pour calmer la tête j’le prends !

– Ils t’en donnent beaucoup des médicaments ?

– Eh j’vous jure y quelqu’un il s’appelle X ici, wallah ils vont le tuer avec les médicaments. Sur la tête de ma mère. Il marche plus le mec, il parle plus maintenant. Il marche plus, il parle plus, ça fait une semaine on lui dit, on lui interdit de prendre les médicaments. Comme ça il reste avec nous, comme ça on lui donne pas les médicaments. Maintenant il parle bien avec sa famille, il parle avec nous, il fait du sport.

– T’aurais le nom des médicaments ?

– Lyrica, [passage inaudible], Tramadol, Subutex (4)… des médicaments c’est pas pour nous, c’est pas pour les gens du centre de rétention, de prison, c’est pour les lunatiques les gens qui vont dans l’hopital de lunatique c’est pas à nous ça.

En plus vous savez j’parle pas de moi, j’parle en général, moi j’suis en train de perdre ma vie j’ai une femme dehors.

– Ça fait combien de temps que t’es là ?

– Ça fait 38 jours, même tout ce qui est [passage inaudible] pour des preuves Forum, mais le jour quand je suis parti au juge, le jour de mon jugement, t’as vu les papiers ils sont noirs, ya pas de preuve, c’est noir. Ça veut dire moi si j’ai mes preuves, elles vont partir au juge, tranquille y a pas de faute, normalement je suis sorti après 3 jours.

– En fait Forum photocopie en noir vos papiers ?

– les Forums c’est des traitres, les policiers c’est des traitres, je fais confiance à personne. C’est pour ça on appelle le journal parce qu’on a confiance en vous, c’est vous qui va avancer l’article. Si vous voulez vous venez voir.

– Quand il y a des visites de journalistes ils font semblant que tout va bien.

– T’as vu quand vous êtes là, c’est eux qui font les victimes à dire que nous on insulte, mais nous on est des arabes, on est des musulmans, on n’insulte pas. On a des familles, on a un principe. Mais c’est eux ils nous poussent pour les insulter.

– Est-ce qu’ils sont violents ?

– Je vous vous jure venez, je vous ramène deux mecs qu’ils ont ramassé des coups de poing, des coups de balai, laisse tomber. Et en plus ils ont porté plainte, si vous voulez je les ramène les deux mecs. Ils se sont fait frapper, après ils ont porté plainte, mais au jour d’aujourd’hui y’a rien du tout. Jusqu’à aujourd’hui ils sont là, et hier quelqu’un les a mis à l’isolement.

– Ils sont partis à l’isolement ?

– Ouais. Ils sont partis hier à l’isolement. Et même hier, pour leurs deux gamelles [passage inaudible]. Hier y’a un policier, c’est pas un policier, c’est un chien. C’est un fils de chien. C’est à cause de lui qu’on a pas l’appétit. Même on le voit, y’a rien qui passe. On peut pas manger, on peut pas rigoler pour nous, on peut pas parler. Il vient, il fait le bonhomme, t’as compris ? Dedans il fait le bonhomme, mais quand il est dehors il marche avec les murs. Ici il fait le mec qui a le droit de frapper et d’insulter tout le monde. Mais on n’est pas en Tunisie ou en Algérie ! C’est la police de l’Algérie ou de la Tunisie qui insulte les gens ? C’est pas ici, pas en France ? En France on a des droits, comme vous, comme nous, comme tout le monde. C’est pas parce qu’on n’a pas les papiers qu’on est des criminels. On est pas des criminels. On est là, on est dans la vie, on aide notre famille, on veut avancer dans la vie ici. Si chez nous, en Tunisie ou bien en Algérie ou bien au Maroc, la vie c’est bien, c’est stable et tout, on va rester chez nous. Je vous explique, y’a des gens ils ont fait trois fois les demandes, quatre fois les demandes, pour le consulat d’Algérie ou de la Tunisie, le consulat leur refuse, alors pourquoi ils sont toujours là ? C’est ça que je comprends pas. Ça se fait pas. Moi j’ai une femme dehors, mon pote X il a une femme et une fille dehors, X pareil, X pareil, X il a des papiers et une famille en Italie, il est toujours là je comprends pas, X il est sorti de prison miskin, il vient de prison ! Il a fait sa peine, et il se retrouve ici ! X pareil, il a les papiers d’italie et il est toujours là. Je comprends pas ils font quoi comme travail, laisse tomber. Laisse tomber sur la tête de ma mère j’ai rien compris wallah.

– T’étais là hier à la manifestation ?

– Ouais j’étais là ! J’étais là hier. Hier c’était quoi ? On mange tranquille, on rigole, y’a le policier il vient à côté de mon pote il met son pied à côté de son plat. Il a dit « t’es pas content ? ». Mais t’es pas content, mais ça se fait pas ! À côté de X, il est venu il a mis son pied à côté du plat de X, et il le regarde et il dit « t’es pas content ? ». Mais nous surtout ce policier on lui parle même pas ! y’a personne qui parle avec lui ! Et lui, tellement il est jaloux, ou bien je sais pas qu’est-ce qu’il a avec nous, c’est lui qui cherche la merde avec nous ! Mais t’as vu, si y’a pas de trucs hallal, y’a pas de soucis, les machines il y a des sandwichs, des salades et tout : y’a rien.

– y’a rien dans les machines ?

– Rien, je te jure y’a rien. Aujourd’hui, juste pour nous fermer notre gueule et tout, ils ont mis même pas six sandwichs la tête de ma mère. Même pas six sandwichs !

– Ils ont juste fait semblant de remettre des trucs, mais ils ont rien mis quoi…

– T’as compris, juste pour dire tiens ferme ta gueule ! Tu veux des sandwichs tiens ferme ta gueule. Six sandwichs mais on est presque trente personnes ici. [passage inaudible] et on demande des télés, des télés, des télés, il nous dit quoi ? Il nous dit « non, vous vous coutez cher. Chaque personne ça coute 5000 euros par jour. » J’ai dit « c’est pas mon problème ça ! »

– bah ouais vous avez pas demandé à être là.

– Bah ouais et puis je m’en fous je coute 5000 ou je coute 10000 euros c’est pas toi qui paye de ta poche ! Il m’a dit quoi ? Il m’a dit « vas-y ferme ta gueule et rentre dans ton lit sinon je te ramène en isolement ». Mais ça se fait pas ! Sur la tête de ma mère ça se fait pas. Bah je sais pas, il faut qu’on fixe un rendez-vous et que vous veniez ici sans leur dire rien. (…) T’as vu les couettes ici ? Depuis 2008 ! Depuis 2014 ! ça veut dire tu mets les couvertures sur toi, sur la tête de ma mère demain tu te grattes comme un fou, tu grattes tout le corps. (…)

Bonne soirée, je vous passe personne X.

– Bonne soirée et bon courage.

– Merci et même si c’est pas le week-end passez un bon week-end en avance.

 

TÉMOIGNAGE 5

 

– ça va ?

– Ça va et vous ?

– Ça va. Est-ce que t’as envie de rajouter des trucs sur ce que les autres ont dit ?

– Oui. Là, il y a un Roumain, il est avec nous. Il va faire 19 ans bientôt, dans trois mois, il m’a expliqué. Il m’a dit le matin, parce que le matin vers 11h du matin, ils nous font sortir dehors, dans la cour, pour faire le ménage et tout ça. T’as compris ou pas ? Il m’a dit comme quoi le matin, quand ils sont venus le réveiller, il a dit « attendez avant de sortir pour que je mette mes affaires, il faut que je m’habille, il faut que j’aille aux toilettes ». Ils l’ont pris par les épaules, avec un short, ils l’ont fait sortir en promenade avec un short ! Y’en a un il a mis une gifle, il a mis un coup de poing dans la tête ! Ça se voit, que c’est rouge ou quoi. Vous comprenez ou quoi ?

– Ils lui ont mis un coup de poing dans la tête ?

– Voilà, un coup de poing dans la tête. Je te jure. C’est pour ça que je t’ai dit tout à l’heure. En plus ils l’ont ramené à l’isolement, et ils l’ont frappé ! Pour rien en fait ! Ça veut dire, c’est comme toi tu viens, tu lui « allez, vous pouvez sortir de la chambre », tu lui dit « laisse moi le temps de me préparer, de m’habiller en fait, pour aller aux toilettes, je veux pas me pisser dessus ! » Ils l’ont fait sortir, ils l’ont pris par les épaules, il lui ont mis un coup de poing, et ils lui ont mis les menottes et ils l’ont amené à l’isolement, et ils l’ont frappé ! Ils l’ont gardé pendant près de 10 heures à l’isolement. Vous comprenez ? C’est un gamin, il a 19 ans. Même pas 19 ans. Dans quatre mois ! C’est le plus petit du centre. Normalement tout le monde quand il le voit ça lui fait de la peine à nous déjà. Imagine, t’as la police qui vient, ils le frappent ils lui font la misère. Ça se fait pas !

– Ouais. C’est chaud.

– C’est chaud. C’est chaud bouillant. Voilà quoi… Vous voulez savoir quoi de plus ?

– Est-ce que tu peux raconter un peu la manifestation, quand les CRS sont venus, qu’est-ce qu’ils ont fait après ?

– Le civil il est venu, un civil arabe il a parlé avec nous, il a dit « calmez vous, on va essayer de changer la situation » et tout ça, et parce que nous on a dit, on a dit « regarde, tous les trucs qu’il y a à manger, c’est dégueulasse, on peut pas le manger. Ils mettent même pas des trucs pour manger, des sandwichs et tout ça. » Aujourd’hui ils sont venus, le civil il a parlé avec tout le monde, il a dit « écoutez nous, restez tranquille, chacun prend son matelas il va rejoindre son lit, et demain je m’occupe de ça, vous inquiétez pas, je vais mettre des sandwichs, je vais mettre tout ça ci ça ça ça. » T’as vu, en gros, il veut nous calmer en fait, avec des paroles nanani nanana, il fait deux trois paroles, et tu te calmes. Et d’habitude la porte, ils vont nous fermer à 23heures. Ben hier ils ont fermé la porte à 9heures, 9heures moins le quart ! On n’avait plus de briquet, on a plus le droit au briquet, on peut plus fumer des clopes avec tout le stress, on peut même pas fumer. Jusqu’à 23 heures quand ils sont venus faire la ronde, je voulais allumer une cigarette.

Et bien comme je vous l’ai dit tout à l’heure pour la machine, ils sont venus, ils ont mis 3 sandwichs, derrière chaque sandwich ils ont ont mis des bouteilles de cocas. Quand tu passes devant la machine, tu vois que y’a des sandwichs, et en fait il y a rien. Il y a trois personnes qui vont prendre chacun un sandwich, derrière le sandwich il y a quoi ? Il y a une bouteille de Coca qui passe avec. Vous voyez ce que je veux dire ?

Ils nous prennent vraiment pour des imbéciles. Il n’y a pas de lois, il n’y a rien ici. Là on est trois personnes là. On est 3 personnes dans la chambre, il en manque un. on a des papiers italiens illimités, on a toute notre famille en Italie, on a tout ce qu’il faut hein, mais on est là. Le problème on nous a dit c’est que comme quoi l’Italie nous a refusé. Je vous jure, j’ai appelé mon père, il a fait sortir le papaier comme je te disais tout à l’heure, le papier où je vais sortir après la date de mon premier jugement. En gros, eux ils s’en battent les couilles des papiers, ils veulent juste nous garder. Comme il a dit mon ami, bonjour 28 jours, bonjour 28 jours. Aujourd’hui, ça fait 28 jours. Avant, le maximum c’était 45 jours, maintenant ils ont fait 3 mois. Au bout de 3 mois ils te ramènent des tests, et si tu refuses les tests pour pas rentrer chez toi, et bien ils te ramènent en prison pour encore 3 mois. Après 3 mois, ils vont te ramener ici.

Je te jure, tu peux rien, t’es comme du beurre, tu vois, du beurre qu’on met sur un plateau et qui va fondre, et ben nous c’est pareil, je vous jure. Parfois on rigole, mais c’est pas un rire qui sort du coeur; juste on fait semblant de rire pour que ça se passe bien en fait.

Il y a des gens qui ont le Covid et qui sont en prison et bien tous les jours des médecins ils vont contrôler si la température est montée ou pas. Ici, même quand tu vas voir un médecin,  il se moque de ta gueule. Quand tu lui dis « je suis malade », ici, y’a même pas un psychiatre ou un psycholoque. Dans le CRA, c’est la première chose qu’il doit y avoir, un psychologue et un psychiatre. Parce que t’es dans un centre et y’a trop de problème, c’est obligé de voir un psychologue avec qui tu peux parler et tout ça, et t’as le droit à un psychiatre, qui parle avec le psychologue, et comme ça le psychiatre il te dit : « tu veux quoi que je te donne? » T’as le droit à des médicaments ou je sais pas moi. Même le dentiste, du côté jaune, il y a presque 15 personnes qui ont mal aux dents, tu vas parler avec le dentiste, mais le seul truc qu’il te donne c’est quoi ? Du Doliprane. Mais je vais faire quoi moi avec du dolipane ? Je vais le prendre ce soir, ça va me calmer la douleur pendant 2-3 heures, et demain je me réveille et c’est encore pire. ça sert à quoi?
Il y a rien. Même il y en avait un, ils l’on ramené, il devait avoir une opération aux jambes. Il a fait un accident du travail. Ils l’ont ramené au bled deux trois jours avant l’opération. ça veut dire qu’ils l’ont ramené au bled, là-bas en Tunisie, mais en Tunisie, quand t’as pas d’argent, tu peux pas te soigner. Il est parti au bled, il n’avait même pas un centime, il va faire comment là-bas ? Il va être handicapé, mais à cause de qui?  A cause de la France. (…)

Nous on a pas besoin d’eux en fait. Ni des policiers, ni des médecins, ni de rien du tout. S’ils nous laissent faire le ménage, on peut faire le ménage. Si on peut avoir un plat dans la chambre, on cantine des trucs, on fait à manger, on a pas besoin d’eux en fait. Je vous jure, il y a des policiers, on peut même plus voir leur tête tellement ils ont des gueules, on dirait des gueules de diable en fait. Surtout le matin, on leur dit bonjourà la porte de la chambre, t’as vu comment eux ils disent bonjour ? On dirait ils se foutent de ta gueule en fait. Je te jure. Hier, ils sont venus me réveiller pour aller au jugement, ils sont venus à 7 heures, ils m’ont dit : « Bon, t’as une demi-heure pour te préparer ». J’ai regardé l’heure, à 7h15 j’étais prêt, je me lève pour faire le café et tout, ils me disent à 7h17 qu’on doit y aller. Je leur dis que j’avais jusqu’à 7h30, ils me disent : « non, on a pas tous la même heure ». Comment ça on a pas tous la même heure ? ça veut dire quoi ? Ils prennent des gens pour des cons ? Ils prennent trop trop trop les gens pour des cons. C’est n’importe quoi.

 

 

(1) Forum Réfugiés, l’association qui officie au CRA de Lyon pour « l’accompagnement juridique » des prisonnièr·es, mais qui en réalité travaille main dans la main avec la police.

(2) PAF : Police aux Frontières. Police qui gère les CRA, et qui commet des rafles dans les gares, aux frontières…

(3) côtés : les différents blocs au sein du CRA de Lyon.

(4) médicaments prescrits entre autres pour le traitement de l’épilepsie, ou de la dépendance à l’opium ou l’héroïne. Tous ces médicaments entraînent une forte dépendance.

Manifestation contre la construction du nouveau CRA de Lyon et pour la fermeture de tous les centres de rétention !

Pour exiger l’arrêt de la construction du nouveau CRA de Lyon et la fermeture de tous les centres de rétention, rendez-vous le samedi 30 janvier place Bellecour !

En novembre 2019, le gouvernement a annoncé la construction de trois nouveaux centres de rétention administrative à Orléans, Bordeaux et Lyon. D’autres projets sont aussi en cours dans plusieurs villes. Les travaux du nouveau CRA de Lyon sont déjà bien avancés. Il y a déjà un CRA à Lyon, près de l’aéroport, qui enferme des milliers de personnes sans-papiers par an.

Les centres de rétention administrative sont des prisons pour enfermer les personnes qui n’ont pas les bons papiers. Ils sont gérés par la Police aux frontières. Ce sont des lieux où les violences policières, les insultes et les humiliations sont quotidiennes. L’État y enferme des sans-papier.es jusqu’à 90 jours, le temps d’organiser leur expulsion, mais aussi pour les faire souffrir, les traumatiser, les dégoûter de leur présence en France, leur enlever toute perspective d’avenir dans le pays.

L’ouverture du nouveau centre de rétention est prévue pour 2022. Cette construction à Lyon n’est pas due au hasard : le CRA actuel était le seul de toute l’Auvergne-Rhône-Alpes, région de passage pour beaucoup d’exilé·es. Toute personne arrêtée à la frontière avec la Suisse ou l’Italie peut y être enfermée. Ce projet doublera donc les capacités d’enfermement et d’expulsion pour la région. C’est bien la politique menée par l’État depuis plusieurs années : multiplier les rafles et les arrestations, et augmenter les places en rétention et les expulsions, pour réprimer toujours plus les personnes sans-papiers plutôt que de les régulariser.

Ce projet va coûter plus de vingt millions d’euros à l’État. Le terrain sera loué à Vinci pour 100 000 euros par an. C’est le géant du BTP Eiffage qui s’occupe du chantier, avec plein d’autres entreprises qui font ainsi leur business sur l’enfermement des personnes sans-papiers.

Rendez-vous le samedi 30 janvier à 10 heures place Bellecour pour exiger l’arrêt de la construction du nouveau CRA de Lyon et la fermeture de tous les centres de rétention

Liberté pour tous·tes!

Régularisation de tous·tes les sans-papiers!

Ni ici, ni ailleurs!

Ni constructions, ni expulsions!

 

Manifestation organisée par le Collectif des sans-papiers de lyon (csp69), le Genepi Lyon et le collectif Lyon anticra

Parloir sauvage en soutien aux prisonnièr·es du CRA de Lyon-Saint-Exupéry

L’État continue à enfermer et mettre en danger la vie des prisonnièr·es malgré les nombreux témoignages des personnes enfermées en CRA, les mobilisations importantes de la Marche des solidarités partout en France en octobre 2020 et la manifestation pour la fermeture des centres de rétention du 28 novembre dernier à Lyon.

Soutenons les luttes des personnes enfermées et exigeons la fermeture des centres de rétention, la fin de l’enfermement et des expulsions !

Deux jours avant l’Acte 4 des Sans-Papiers, rendez vous le mercredi 16 décembre 2020, devant le CRA de Lyon Saint Exupéry pour répondre à l’appel des prisonnièr·es et montrer notre solidarité !

Les CRA sont des prisons où l’État enferme les personnes qu’il considère comme irrégulières sur le territoire français parce qu’elles n’ont pas les « bons » papiers. L’objectif officiel de l’État, par l’intermédiaire de la PAF (police aux frontières), est de maintenir ces personnes enfermées pour organiser leur expulsion. Les prisonnièr·es peuvent être emprisonné·es jusqu’à 90 jours au cours desquels iels subissent des violences physiques et psychologiques. Les violences policières, tortures, insultes et humiliations sont quotidiennes. A cela se rajoute la possibilité pour l’État de les condamner à de la prison ferme pour toutes sortes de prétextes : notamment le fait de résister à la déportation, ou en ce moment par exemple, le fait de refuser de faire un test covid.

Début novembre, des personnes enfermées au CRA de Lyon ont été testées positives au covid 19. Les prisonnièr•es ont entamé une grève de la faim pour exiger leur libération immédiate.

Actuellement, beaucoup de frontières sont fermées. Quand l’expulsion n’est pas possible, les CRA montrent leur vrai visage : l’État continue de faire payer aux sans papiers leur présence en les maintenant enfermé·es, mettant leur vie en péril en temps d’épidémie mondiale.

La gestion criminelle de la crise sanitaire s’ajoute aux conditions de détention habituelles (insalubrité, promiscuité, nourriture infecte, justice répressive, manque de soins, déni du droit de visite, violences policières en toute impunité…).

Dans le contexte général de stigmatisation et de criminalisation des personnes étrangères, l’État fait le choix de durcir davantage ses politiques racistes et carcérales. Le CRA continue de se remplir. L’Etat français fait pression sur d’autres gouvernements pour expulser toujours plus et assoir sa violence néo-colonialiste, assumant un chantage aux visas notamment pour l’Algérie, la Tunisie et le Maroc.

L’ouverture de plusieurs nouveaux CRA est programmée. À Lyon, la construction d’un deuxième centre de rétention a commencé depuis plusieurs mois à quelques centaines de mètres du CRA actuel, sur un terrain appartenant à Vinci. Le budget estimé est de 12,5 millions d’euros, sa surface de 3200 m2, et sa capacité d’enfermement de 140 places. D’autres entreprises privées collaborent avec l’État et travaillent à maintenir le système des CRA tout en se faisant du fric. À Lyon, le marché de la construction du nouveau CRA a été attribué à Eiffage, assisté par l’entreprise ICAMO, qui s’y connait déjà en construction de taules vu qu’elle a géré des chantiers pour d’autres prisons notamment à Saint-Quentin Fallavier.

En soutien aux luttes des personnes sans papiers enfermées et isolées, mobilisons-nous pour la fermeture définitive des centres de rétention et contre la construction du deuxième CRA de Lyon !

Régularisation de tous·tes les sans papiers !

Ni expulsions, ni prisons,

Virus ou pas, à bas les CRA !

 

Rdv le mercredi 16 décembre à 18 heures devant le CRA de Lyon, rue du Royaume-Uni à Colombier-Saugnieu.

 

Rassemblement déclaré en préfecture, organisé par le Genepi Lyon et le collectif Lyon anticra.

Contre la construction d’un nouveau centre de rétention administrative à Lyon, mobilisons nous !

Lien vers l’article : https://rebellyon.info/o-Contre-la-construction-d-un-nouveau-22218

Le centre de rétention adminisrative (CRA) actuel de Lyon se trouve à Colombier Saugnieu, juste à côté de l’aéroport de Lyon Saint Exupéry. Il a été créé en 1995 dans un ancien hôtel Formule 1. Après un premier aggrandissement en 2019, il est prévu d’en ouvrir encore un autre en 2022…

Les centres de rétention administrative sont des prisons pour étrangèr·es. Bien qu’ils ne soient pas désignés comme tels officiellement, ce sont des lieux d’enfermement où les violences policières, les menaces et les humiliations sont quotidiennes. L’État y enferme les personnes qu’il considère comme en situation irrégulière sur le territoire français. Les prisonnièr·es peuvent y être détenu·es jusqu’à 90 jours, à l’issue desquels iels sont soit déporté·es soit incarcéré·es en maison d’arrêt, soit relâché·es (tout en restant sous la menace constante d’une nouvelle arrestation).

En 2018, plus de 45 000 personnes ont été enfermées dans les 24 centres de rétention de France métropolitaine et outre mer. Cette année-là, 480 nouvelles places ont été créées, en aménageant les CRA existants, mais aussi en les agrandissant comme à Nîmes, Vincennes, Coquelles ou Lyon. En novembre 2019, le gouvernement a annoncé la construction de trois nouveaux CRA à Olivet (proche d’Orléans), Bordeaux et Lyon, avec pour objectif d’augmenter toujours plus les capacités d’enfermement. Ce sont les premières constructions de CRA depuis près de dix ans. L’État s’emploie à enfermer, torturer et expulser toujours plus les étrangèr.es. Et il ne lésine pas dans la guerre qu’il mène contre les personnes qui n’ont pas les « bons » papiers.

Le CRA actuel de Lyon se trouve à Colombier Saugnieu, juste à côté de l’aéroport de Lyon Saint Exupéry. Il a été créé en 1995 dans un ancien hôtel Formule 1. Il a été agrandi en 2019, pour arriver à une capacité de 140 places. Il est « géré » par la Police aux Frontières (PAF) et par Forum Réfugié, association à laquelle l’Etat sous-traite un prétendu « accompagnement juridique », mais dont le rôle réel est de collaborer à la machine à enfermer et à expulser. En 2018, 1 498 adultes et 2 enfants y ont été enfermés, dont 92 % d’hommes et 8 % de femmes, selon le rapport annuel des associations qui interviennent dans les centres de rétention.
 
Le début des travaux du nouveau CRA est annoncé pour mai 2020. L’ouverture est prévue pour 2022. Il devrait être construit à proximité immédiate du CRA actuel, sur un terrain appartenant à Vinci, comme toute la zone autour de l’aéroport. Le budget estimé est de 12,5 millions d’euros, sa surface de 3200 m2, et sa capacité de 140 places. 
 
Nombre d’entreprises privées collaborent avec l’État et travaillent à maintenir le système des CRA. Entre la réouverture des CRA de Hendaye et de Geispolsheim, l’extension des CRA de Nîmes et de Coquelles, et le lancement des nouvelles constructions, les appels à projets fleurissent sur les plateformes d’annonces de marchés publics, et les promoteurs immobiliers constructeurs de taules partent à la cueillette des contrats juteux. Une poignée d’entreprises se partagent le marché : Eiffage, Thémis – FM [filiale Bouygues], Gepsa [filiale d’Engie], Sodexo, Spie Batignolles. À Lyon, la “réalisation” du nouveau CRA a été attribuée à Eiffage, censée être assisté par l’entreprise ICAMO, qui sur son site internet place la construction d’un CRA dans la rubrique “Sureté”, et qui a déjà géré des chantiers pour la prison de Saint-Quentin Fallavier.
 
À Olivet, près d’Orléans, l’ouverture est prévue pour 2023, et le coût total estimé à treize millions d’euros. Un collectif s’est monté, et une mobilisation a d’ores et déjà commencé. Le 4 avril, une manifestation devait avoir lieu à Orléans. 
 
La pandémie de Covid-19 apporte de nouveaux éléments à la situation. Dans les centres de rétention, les conditions d’enfermement étaient déjà merdiques, elles se sont encore plus dégradées : aberration d’être enfermé·es – en temps normal – mais encore plus alors que les déportations ne peuvent plus avoir lieu (plus d’avions, frontières fermées) ; parloirs interdits accentuant l’isolement ; impossibilité de respecter les « gestes-barrières » quand les cellules sont bondées ; impossibilité de « se défendre » correctement face au système judiciaire répressif, audiences au tribunal se déroulant sans les prisonnièr·es ; inquiétudes face aux incertitudes et tensions ; flics de la PAF qui peuvent entrer/sortir et diffuser le virus…. La machine à expulser ne peut plus fonctionner le système CRA montre donc son vrai visage : celui d’enfermer/torturer les personnes qui n’ont pas les bons papiers, quand bien même l’Etat et la PAF ne peuvent plus les déporter. En clair, Il faut continuer à enfermer, tant pis pour elleux s’iels crèvent.

Dans de nombreux centres, des prisonnièr·es se sont mobilisé·es, parfois en entrant en grève de la faim, pour exiger leur libération immédiate ; en faisant sortir leurs paroles à l’extérieur ; en bloquant les cours et les promenades. Bien que des détenu·es aient été libéré·es au cas par cas, les arrestations ont continué et de nombreuses personnes ont continué d’être incarcérées.

Le confinement et les politiques répressives et sécuritaires qui l’accompagnent rendent très difficile toute forme de mobilisation collective. De nombreux chantiers sont à l’arrêt, mais d’autres continuent coûte que coûte, au mépris de la protection de le santé des travailleur·euses, et il y a de fortes chances que ce soit le cas pour la construction du nouveau CRA. Il nous faut donc informer au maximum sur la construction qui se prépare, commencer dès maintenant à nous organiser collectivement, et nous tenir prêt·es à nous mobiliser rapidement, dès que ce sera possible, pour que cette nouvelle prison ne voie par le jour.

À bas les cra, à bas les frontières, soutien à tous·tes les prisonnièr·es !

CRA de Lyon Saint-Exupéry, 3 mois de prison ferme pour un matelas

[ On relaye ici un article du site rebellyon.info]

Le jeudi 16 août dernier, la PAF a une fois de plus tabassé des prisonniers du Centre de Rétention Administratif de Lyon-St-Exupéry. Des personnes se sont retrouvées à terre, gravement blessées, pendant que d’autres appelaient à l’aide. Les keuf.es les ont parquées pendant plusieurs heures, et bien évidemment, iels n’ont fait venir aucune assistance médicale malgré les appels. Pour se faire entendre, T., emprisonné au CRA, met le feu à un matelas. Il a été jugé le lundi 19 août en comparution immédiate, et a été condamné à 3 mois de prison avec maintien en détention. Résumé de l’audience.

La juge procède à l’habituel épluchage de l’identité du prévenu et son ton suspicieux quant à la présence de l’interprète présage déjà de l’issue de l’audience… T. comparait « pour avoir à Colombier-Saugnieu le 15 août dernier détruit volontairement un bien, en l’espèce en mettant le feu à un matelas appartenant a priori au centre de rétention administrative, et ce en état de récidive légale ».

Le prévenu a reconnu les faits. Mais la juge ne peut s’empêcher d’y aller de sa propre interprétation scénique pour rendre l’histoire encore plus croustillante… Elle raconte donc qu’en plus il a été filmé, qu’on le voit très clairement sur la vidéo surveillance, qu’on voit très bien le déroulé, etc. (en même temps, avec près de 100 caméras dans tout le CRA, c’est difficile de les éviter, enfin sauf quand ça arrange les keuf.es bien sûr…). Elle conclut finalement : « Heureusement il n’y a pas eu de décès ». Cependant, madame semble étonnée par ce qu’elle considère comme le « contexte assez particulier » (mais en vrai tout à fait habituel) de cette soirée-là au sein du CRA… En fait, au moment de regagner leurs cellules, les détenus ont refusé et les flics les ont matraqués; ce qu’elle traduira par « Au moment où chacun devait regagner sa chambre entre guillemets, il y a eu une opposition, un refus de la part des retenus, ça s’est un peu agité, il y a eu des violences, ce qui a donné lieu à cette réaction ».

T. a expliqué dans sa déclaration les raisons de son geste : des violences ayant été commises par les policier.es sur d’autres retenus, une personne est blessée et perd du sang. Il signale la blessure mais personne n’intervient. Pour alerter l’attention, il met le feu au matelas. « Y a d’autres manières moins dangereuses pour attirer l’attention », rétorque-t-elle toujours aussi sarcastique… T. explique que pendant le temps de prière, les policier.es s’amusaient à allumer-éteindre-allumer la lumière. La juge se réfère au PV des flics et joue les étonnées : « Y avait pas une panne d’électricité? » …

Pour continuer dans la mauvaise foi elle cherche d’autres arguments pour pouvoir le coincer… Elle se lance donc dans le décryptage psychologique de l’attitude de T. sur les vidéos; et au cas où ce ne serait pas suffisant, elle invoque également ses antécédents judiciaires et finit, conquérante, par le coup de la culpabilisation : « Tout justifie donc que vous employiez des moyens aussi dangereux qui peuvent avoir des répercussions et des conséquences terribles? ».

C’est au tour du procureur d’entrer en scène : lui aussi s’attarde sur les éléments de personnalité, mais il manie surtout l’art de l’emphase : « C’est à trois reprises qu’il va s’en prendre à ce matelas »… Concernant la personne blessée, il commente « nous n’avons pas d’élément qui vient corroborer ». Il ressort lui aussi le coup de l’élec et parle d’un « incident technique ». Il conclut : « Rien ne peut justifier de tels troubles », « Ce genre de comportement perturbe le fonctionnement du centre de rétention ». Il demande 3 mois fermes avec maintien en détention.

L’avocate de T. explique que compte-tenu de ses antécédents, il savait ce qu’il risquait en mettant le feu, mais qu’il s’agit-là d’un « acte désespéré ».

La juge donne la parole à T. :

  • T. : «La personne qui était par terre saignait, elle était en danger de mort»
  • Juge : «Merci, la décision sera rendue à la prochaine suspension.»

Voilà, merci, au revoir.
Verdict : 3 mois de prison avec maintien en détention.
Un énième procès, une énième mascarade, une énième peine de prison. Les audiences défilent, mêmes scénarios, mêmes acteur-ices. On ne change pas une équipe qui gagne…

Mais gagner jusqu’à quand?

Partout et tous les jours, dans les CRA de France et d’ailleurs, les prisonnier-es se révoltent, luttent et se défendent (grèves de la faim, refus de rentrer en cellules, communiqués…). Mais la résistance a un prix, c’est un énième prétexte à la surenchère dans la répression qu’iels subissent déjà au quotidien dans le système CRA. Car non, les « pannes d’électricité » n’existent pas dans les prisons de l’Etat, pas plus que n’existe la justice qui l’accompagne…

A bas les CRA, à bas les frontières et soutien à tous.tes les prisonnier.es!

 

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https://rebellyon.info/CRA-de-Lyon-Saint-Exupery-3-mois-de-21018